Résine et bois : je fais ma « river table » !
L’association bois / résine époxy, c’est la possibilité de vraiment laisser libre court à votre imagination et votre créativité. Le potentiel décoratif est presque infini et la robustesse est sans faille. Parfait donc dans le domaine de l’ameublement et de la décoration ! Depuis quelques années, on a ainsi vu naître, sur Internet notamment, les fameuses river tables : un plateau de table, qui combine des éléments en bois et d’autres en résine, souvent teintée, formant comme une sorte de rivière. Cet article vous donne la procédure pas-à-pas pour fabriquer un beau bureau avec un plateau façon « river table ».
Cet article pas-à-pas est un complément à la parution de notre nouveau livre Résine et bois : tout pour réussir vos créations ! La démarche décrite ici sommairement et montrée en images est expliquée en détails dans le livre, avec de nombreuses variantes techniques, des idées créatives, et des pas à pas variés (console, planches de présentation, horloge, lustre, skates décoratifs, guitare, panneau mural, dessous de verre…).
Par Cyril Boinon
Principe : la résine époxy se présente en deux composants : la résine d’un côté (produit A), et le durcisseur de l’autre (produit B). Il y a des dosages à respecter très précisément. Pour cela, une petite balance allant jusqu’au gramme suffit. Il est conseillé de travailler à une température d’environ 20 °C, un atelier chauffé est donc bien adapté. Le mélange doit aussi se faire de façon active, souvent pendant plusieurs minutes (les fabricants de résine donnent toutes les indications de façon très claire, chaque produit ayant ses spécificités).
[Cliquez sur les images pour les agrandir]
1 - Choix du plateau de hêtre en 41 mm d’épaisseur. Celui-ci est assez large et je décide de le refendre au milieu d’un trait de scie pour ensuite mettre les flaches face-à-face.
Note : ici le choix du hêtre qui est assez rectiligne était dicté par le projet, mais ce n’est sans doute pas la meilleure essence pour ce type d’application. Préférez un bois plus sinueux.
2 - Retrait de l’écorce restante à l’aide d’un ciseau à bois.
3 - Brossage mécanique à poils laiton à l’aide de la visseuse (placez un gros tuyau d’aspiration pour cette étape qui dégage beaucoup de poussières ou mettez-vous en extérieur si vous en avez la possibilité).
4 - Dégauchissage et rabotage des deux parties de plateau, avec surcote en épaisseur de 1 à 2 mm. Possibilité de réaliser un brûlage des flaches au chalumeau pour foncer celles-ci avant l’utilisation de la résine : cela augmente le contraste avec le plateau clair.
5 - Traçage d’équerre et tronçonnage des extrémités de plateaux avec une surcote par rapport aux dimensions finales.
6 - Fond de coffrage en mélaminé lisse (aggloméré de 18 mm recouvert d’une feuille de particules lisse).
7 - Cire de démoulage : elle existe en pot traditionnel, à passer au chiffon ou à l’éponge ; elle existe aussi en aérosol très commode d’emploi. Dans les deux cas, après l’avoir appliquée sur le coffrage, laissez un peu évaporer le solvant puis lustrer à la brosse habituelle.
8 - Vue sur l’application de la cire à l’éponge.
9 - Les joues de coffrages sont situées aux deux extrémités des plateaux (bois de bout). Contre vissez-les après les avoir solidement bloquées à l’aide de serre-joints. Recouvrez ces joues avec du ruban adhésif (le marron fin est parfait, encore mieux que le orange sur la photo) ; vous pouvez aussi utiliser à nouveau du mélaminé ciré.
10 - Montage de l’ensemble sur le coffrage de fond et vérification du niveau. Cette façon de faire, part rapport à la procédure décrite plus haut où j’enduisais le dessous des plateaux et versais de la résine directement dans le coffrage vise à ne pas recouvrir le dessous des plateaux par de la résine (on limite la résine uniquement à l’espace inter-flaches). Serrez bien les deux plateaux au coffrage à l’aide de serre-joints. Vérifiez bien l’horizontalité de l’ensemble à plusieurs endroits et dans plusieurs sens ; calez si nécessaire pour un réglage parfait.
11 - Calfatez la jonction entre les joues et les plateaux à l’aide de colle chaude ou de silicone. La colle chaude permet une mise en œuvre immédiate mais est plus fastidieuse à mettre en œuvre (fils de colle, attente pour chauffage du pistolet), surtout si les cordons à effectuer sont longs. Le silicone est au contraire plus rapide et aisé à employer mais nécessite un séchage long. Le but de ce calfatage est d’éviter que la résine sorte de la zone délimitée lors de la coulée. En effet, les résines de coulée sont assez fluides et se répandent pratiquement comme de l’eau, d’où l’obligation d’une bonne étanchéité de votre coffrage.
12 - La réalisation des « mini-digues » de part et d’autre de la zone où va se situer la résine permet d’éviter, là aussi, que la résine ne se répande sur le dessus des plateaux, car elle sera ensuite particulièrement pénible à éliminer si elle n’est pas prévue à cet endroit. Vous pourrez remplir ainsi en excès (plus haut que le dessus des plateaux) et donc faire le fameux overpacking qui permet de compenser la rétraction de prise de la résine. Pour cette étape, vous pouvez également vous servir de silicone.
Le ruban adhésif n’est pas impératif ici, mais il limite le grattage ensuite pour tout retirer. Notez qu’il n’est pas collé à ras les flaches mais à 5 à 10 mm.
13 - Le nécessaire pour la coulée :
• résine pour passe de 10 mm maximum (sachant que l’épaisseur finale est de 30 mm, il faudra réaliser 3 strates à 5-6 heures d’intervalle car il faut couler sur une résine encore collante pour éviter de devoir poncer toute la surface).
• une partie des EPI (ici les gants en nitrile noirs).
• le colorant bleu (ici en pâte).
• la poudre phosphorescente.
14 - Mélange prépolymère + durcisseur + colorant bleu + poudre phosphorescente. La quantité préparée est calculée :
• 1,4 m (longueur) x 0,15 m (largeur moyenne) x 0,03 m (épaisseur) = 0,0063 m3 soit 6,3 litres. Cela équivaut à 6,3 x 1,1 (densité de la résine) = 6,93 kg de résine.
• Comme il faut réaliser 3 strates, il suffit de diviser cette quantité par 3 pour obtenir la quantité à couler par strate : 2,31 kg.
• Dernier calcul à réaliser : combien faut-il de prépolymère pour obtenir 2,31 kg de résine ? Le ratio de cette résine est 100:60, c’est-à-dire 100 g de prépolymère pour 60 g de durcisseur.
et
Il faudra donc 1,44 kg de prépolymère et 0,86 kg de durcisseur à peser précisément à la balance électronique pour obtenir les 2,31 kg de résine.
15 - Coulée de la première strate de fond avec enduisage des flaches au pinceau. Cette action permet d’éviter le dégazage du bois et la formation de bulles d’air emprisonnées dans la résine lors des strates suivantes.
16 - Faites exploser les bulles d’air en surface grâce à de la chaleur (décapeur thermique ou chalumeau très brièvement). Ne « traînez » pas sur le bois pendant cette action car sinon vous obtiendrez l’effet inverse : la chaleur entraînera une libération d’air contenu dans le bois !
17 - Le rendu après débullage doit ressembler à une étendue d’eau parfaitement lisse.
18 - Deuxième strate en cours de coulée, réalisée 5 à 6 h après la première tant que la résine est encore collante au doigt.
19 - Aspect parfaitement lisse après débullage au décapeur thermique de la deuxième strate.
20 - Idem pour la dernière strate (réalisée 5 à 6 h après la deuxième également).
21 - Après décoffrage à J7 et retrait des mini-digues et de l’adhésif. Utilisez des cales en plastique que vous insérerez entre la planche de fond du coffrage et les les plateaux en hêtre.
22 - Notez la diffusion de la résine entre le fond de coffrage et le dessous des plateaux en hêtre malgré la force des serre-joints !
23 - Détail du bois de bout après décoffrage : on note la visibilité des 3 strates de résine et la présence de quelques bulles sur la première coulée. On note également la diffusion de la résine entre le fond de coffrage et la face inférieure des plateaux.
24 - Dans ce projet, j’ai fait le choix de réduire la largeur de l’ensemble résine + berges à 310 mm pour que l’ensemble puisse passer dans ma raboteuse. Vous pouvez évidemment laisser plus large si vous êtes équipés d’une raboteuse ayant des capacités plus importantes ou utiliser la technique de surfaçage à la défonceuse (voir plus haut).
25 - Gros plan sur les copeaux de résine produits par la raboteuse : ils ressemblent à de fines peaux. On note deux conséquences à cela : pas de risque d’inhalation de fines particules, mais possibilité de « bourrage » de votre groupe d’aspiration par accumulation de ces peaux sur les ailettes de la turbine. Faites de petites passes à la raboteuse (avec une avance lente si votre machine vous permet de régler celle-ci) pour ne pas la mettre en difficulté et pour privilégier un bon état de surface et ainsi limiter le ponçage.
26 - Les entailles pour lamelles n° 20 avant collage du plateau de bureau.
27 - Collage et mise en place des serre-joints.
28 - Tronçonnage en bois de bout pour mise à format définitive du plateau de bureau. Maîtrisez l’avance lorsque la lame est dans la résine pour que la coupe soit bien propre.
29 - Ponçage à sec à la ponceuse excentrique sous aspiration continue : P80 – P120 – P180 – P240 (travail sur l’ensemble du plateau).
30 - Ponçage manuel à l’eau de la portion en résine uniquement. Vous allez vous muscler le bras pour cette étape ! Notez qu’il est possible de réaliser cela à la polisseuse : c’est bien moins fatiguant et plus rapide.
31 - Détail des papiers waterproof : P400 – P600 – P800 – P1200 – P1500 – P2000 – P2500 – P3000 et P5000.
32 - Utilisation d’une peau de mouton synthétique et d’un « cutting polish » pour lustrer la surface.
33 - Brillant final obtenu avant traitement par vernis sur le bois uniquement (la résine est laissée polie sans aucun produit de finition supplémentaire). Il faudra veiller avec le pinceau à ne pas passer sur la résine.
34 - Vues finales du bureau.
36 - Phosphorescence de la résine de nuit. Cette effet dure tout une nuit si la résine est convenablement exposée à la lumière durant la journée.
Bureau très réussi !
Bureau très réussi ! Personnellement, pour éviter les coulées sous le bois, j'avais mis de la colle chaude tout le long intérieur du joint (avant la 1ere coulée). Ce dernier ne se voyait pas puisqu'il était sous le plateau.
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